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Faut-il parler français pour devenir volontaire en Belgique?

Faut-il parler français pour devenir volontaire en Belgique? Pas forcément. La non maîtrise ou la mauvaise maîtrise de la langue constitue un frein mais pas un obstacle. Quand on a envie ça fonctionne. On peut faire usage de gestes et de dessins. On peut aussi montrer, faire ensemble. Certaines personnes apprennent très vite quand elles sont en situation. D'autres langues peuvent venir soutenir la communication. On peut faire du volontariat en binôme ou en groupe et s'entraider pour communiquer.

Bien sûr certaines tâches nécessitent en elles-mêmes une maîtrise de la langue. La communication devient aussi moins aisée « quand il s’agit d’expliquer quelque chose qui n’est pas facile à expliquer». Le volontariat est un concept très culturel. Alors que dire du cadre associatif et de ses idéaux, du rapport au temps et aux autres ? Car la communication s'appuie aussi sur de multiples codes culturels et habitus plus ou moins conscients.

A toutes les étapes du volontariat, il s'agira de s'appliquer à bien se comprendre, de faire en sorte que chacun soit bien entendu, en veillant à la forme, au fond et au cadre de la communication.

Imagiers, outils d'animation et de traduction

Certaines tâches ne nécessitent pas de grands discours. Dans la pratique, quelques dessins ou mots traduits peuvent débloquer une situation.

Pistes pour construire une séance de présentation du volontariat

Sur base d'expériences menées, voici quelques conseils et outils pour construire une séance d'info volontariat.

Volontariat et interculturalité : formations et ressources

- les Centres régionaux d'intégration : CAI (Namur), CRIBW (Brabant-Wallon), CRILUX (Luxembourg) Cripel (Liège). CRIC(Charleroi), CIMB (Mons et Borinage et une partie de la Wallonie picarde), CRVI (Vervier), CeRAIC (Région du Centre et une partie de la Wallonie picarde).

- la formation "Interculturalité et volontariat" de la PFV

- les projets de soutien à la diversité dans le volontariat en Flandre, à Bruxelles et aux Pays-Bas

Quelques leviers du volontariat divers

  • Dans les centres d’accueil et les communautés culturelles, l’émulation et le bouche à oreilles font des merveilles.
  • Le témoignage par des pairs peut constituer une vraie ressource pour parler volontariat.
  • Dans le même ordre d'idées, mais aussi pour dépasser les peurs et les barrières de langue, il est possible de proposer du volontariat en binôme ou en groupe.
  • Dans un contexte de vie compliqué, la convivialité, le fun, l’humour, la légèreté, la joie sont des ingrédients importants pour construire des relations de confiance. Un accueil chaleureux, des activités qui facilitent les rencontres favorisent le développement de relations de confiance.
  • De même, alors que tout le secteur associatif et administratif, dans un souci d’efficacité, est très organisé et formalisé, les demandeurs d’asile (et pas seulement eux) sont souvent en quête d’humain et d’informel.. Pour parler de volontariat, on parlera plutôt des actions que des fonctions par exemple, avant de parler d'expliquer le cadre légal.
  • Si les concepts sont difficiles à aborder, alors il faut parler concret ou faire ensemble.
  • Beaucoup de demandeurs d’asile utilisent les TIC pour être en contact avec leur famille et s’orienter en Belgique. Certains outils peuvent aussi servir à mieux communiquer dans le cadre du volontariat.
  • Prévoir des espaces de transmissions des talents, des cultures, et des savoirs.
  • Prendre conscience ou favoriser la mixité dans les équipes de travail ou de bénévoles peut permettre de faciliter les débuts en mettant à profit les ressources linguistiques et culturelles internes à l’association. De même, les demandeurs d'asile connaissent souvent plusieurs langues.
  • Partir des gens et de leur expérience, plutôt que d’installer une communication descendante. Tenir compte de ce qu'ils ne veulent pas faire, de qui ils sont, sans jugement.
  • Proposer des volontariats ponctuels comme porte d'entrée, ou donner l'occasion de s'essayer.

Quelques réflexions pour ouvrir la communication

Le français est une langue difficile et même élitiste, presque impossible à maîtriser en tant que deuxième ou troisième langue.

Un linguiste français a retrouvé des textes d'académiciens du 16ème siècle qui disent que l'orthographe française devra être structurée de telle manière qu'elle soit inaccessible aux ignorants et aux femmes. C'est cette langue que l'on transmet, une langue qui est faite pour ne pas être mobilisée par quelqu'un qui n'est pas né dans cette langue. (…) J’ai constaté que les migrants parlent aisément dans les couloirs entre Turcs, Marocains, Guinéens, un français qui n’a pas peur d'être tordu, qui ne vit pas à travers l'orthographe française, alors qu'en classe ils sont bloqués. (…) Il s’agit de prendre conscience de l'étrangeté de l'orthographe française. J.P. Piolat - UC, lors d'une rencontre du réseau Volonterre d'asile de 2018.

Pour approfondir lilre le dossier "La Langue : entre promesses, oublis et dominations, in Le journal de Culture et démocratie 46, janvizer 2018.

La posture dans laquelle on aborde une personne aura beaucoup d’influence sur la relation.  Trop souvent, malgré toutes ses bonnes intentions, le rapport aux réfugiés est teinté de paternalisme et de jugements.

On dit souvent qu'on va pouvoir apprendre de l'autre, déconstruire nos préjugés, ... Or l’idée ce n'est pas tant d’apprendre de l'autre que d'apprendre de soi, par le regard que l'autre me donne. Car la construction d'un soi démarre avec la présence d'un autre. Donc, c’est quoi le regard de l'autre ? Comment est-ce que je me l'approprie ? Comment il me laisse une place ou pas ? Le regard démarre chez mes proches : ils me regardent et me donnent une forme de confiance en moi qui va me permettre ensuite d'évoluer en société. Si je n'ai pas ce regard bienveillant, je vais avoir du mal à me construire en société. Il y a toutes sortes d'autres regards, dont le regard social : comment le demandeur d’asile face à un jumeau/parrain/aidant va comprendre la place qu'on va lui accorder dans la société. Quelle estime va-t-on donner à son appartenance ? Antoine Boblain, ULB, lors d'une rencontre du réseau Volonterre d'asile de 2018.

Une approche honnête et flexible

Nous encourageons vivement les volontaires et les organisations à avoir une approche honnête. C'est vraiment le nerf de la guerre, le challenge de l'intégration de trouver la manière de communiquer et travailler ensemble, et de trouver des solutions ensemble. (…) L'organisation et le volontaire ne peuvent pas attendre de trop. Nous demandons aux deux parties de discuter clairement leurs attentes et objectifs et d'être flexibles mais d'être sûr d'avoir bien communiqué avant de commencer. Marc – Tandem, lors d'une interview dans le cadre du réseau Volonterre d'asile en 2017.